Laïcs Missionnaries Comboniens

Vers le Forum social combonien sur la ministérialité sociale 2021

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COMMISSION DE LA MINISTÉRIALITÉ SOCIALE DE LA FAMILLE COMBONIENNE

VERS LE FORUM SOCIAL COMBONIEN 2021

ROME EUR 3 – 7 JUILLET 2021

Chers Confrères, Sœurs, Séculières et Laïcs Comboniens ! La paix soit avec vous !

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Nous savons depuis un certain temps que vous attendez le feu vert pour indiquer les noms des représentants de vos provinces qui devaient participer au Forum de la ministérialité sociale. Nous vous remercions pour votre patience et votre disponibilité.

Malheureusement, vu l’impasse créée par la pandémie COVID-19, il n’a pas été possible de convoquer le Forum Social Combonien en juillet 2020 comme prévu et même l’hypothèse de se réunir à nouveau en décembre 2020 s’est effacée à cause de cette seconde vague de ces derniers temps. Nous regrettons une fois de plus de devoir reporter cet événement important en tant que famille combonienne, mais la situation nous demande, avec sagesse, de nous réorganiser pour des temps meilleurs.

L’ÉVÉNEMENT EST DONC REPORTÉ AU 3-7 JUILLET 2021.

Cependant, pour valoriser ce temps qui nous amènera au Forum en présence, nous pouvons animer la Famille Combonienne et la préparer pour l’événement.

Nous nous orientons vers deux événements webinaires de deux jours : un premier rendez-vous en décembre 2020, et un autre en mars 2021.

POUR LA PRÉPARATION :

Faire circuler l’article publié dans Nigrizia en septembre 2020 pour présenter le livre NOUS SOMMES MISSION. Les MCCJ le trouveront directement dans « FAMILIA COMBONIANA » de novembre 2020. Avec cette action, nous voulons aider les participants à se concentrer sur le travail et à arriver préparés pour l’événement de décembre 2020.

DÉCEMBRE 2020 :

2 WEBINAR, VENDREDI 4 et SAMEDI 5 DECEMBRE, DE 15h00 A 17h00 HEURE de ROME

Contenus : = Un changement d’époque : le chemin prophétique de l’Eglise (orateur à confirmer). Il vise à offrir un cadre de référence plus large au parcours du Forum Social Combonien, dans le contexte de Evangelii Gaudium (EG), Laudato Si (LS), Fratelli Tutti – Fratres Omnes (FO).

= Le Forum Social Combonien en comparaison avec le chemin prophétique de l’Eglise (conférencier à confirmer). Une réflexion théologique sur la voie du FSC.

Format :

= Deux webinaires de 2 heures, incluant un espace d’interaction (max 30 min). Le webinaire serait retransmis depuis Rome, avec la participation d’un groupe en présence. Dans d’autres lieux, lorsque cela est possible, les participants seraient invités à se rencontrer et à suivre les interventions ensemble (pour ensuite partager et réfléchir ensemble), mais les conférences seraient toujours diffusées en direct pour permettre de participer à tous ceux qui vont s’inscrire. L’enregistrement des conférences peut être téléchargé sur la chaîne YouTube pour les rendre accessibles même à ceux qui n’ont pas pu se connecter en direct.

Les deux conférences devraient faire l’objet d’une traduction simultanée dans plusieurs langues. Des questions directrices émergeront des conférences pour le partage / réflexion en groupe (ceux qui participent individuellement à Zoom peuvent le faire dans les temps de pause) et un travail chez soi à faire en préparation à l’événement de mars 2021.

Travail chez soi : dans les mois qui séparent les deux événements, les participants auront l’occasion d’approfondir les thèmes et de les mettre en dialogue avec leur pratique ministérielle. Parmi les outils d’étude approfondie, nous recommandons vivement la lecture du livre : NOUS SOMMES MISSION envoyé aux différentes provinces et communautés via une copie électronique et également sous forme de livre.

MARS 2021 : 2 WEBINAR, VENDREDI 5 et SAMEDI 6 MARS 2021

Contenus :

= Présentation de la cartographie des présences sociales et ministérielles de la famille combonienne et première analyse des données (en relation avec les contributions du webinaire de décembre) – travail de groupe à partir des résultats de l’analyse.

= Partage par les groupes de travail (sur Zoom, avec traduction en plusieurs langues)

Format :

Similaire à l’événement de décembre.

Le premier jour, il y aurait une conférence à organiser, suivie d’un travail de groupe. Le deuxième jour, il y aurait un partage des travaux des groupes (avec traduction simultanée) et le lancement du Forum Social Combonien en juillet 2021.

Travail chez soi : en préparation du FSC, les participants sélectionnés prépareront la présentation de leur expérience ministérielle la plus régénératrice.

JUILLET 2021 : 5 JOURS À ROME EUR : 3 – 7 JUILLET 2021

Le format du forum à Rome, resterait celui déjà élaboré par les organisateurs, avec des adaptations, une partie du programme ayant déjà été réalisée lors des deux événements de décembre 2020 et mars 2021. L’avantage sera qu’il sera possible d’approfondir davantage et que les participants arriveront beaucoup mieux préparés et impliqués dans la dynamique du Forum.

En novembre prochain, nous vous donnerons plus de détails sur le premier webinaire des 4 et 5 décembre 2020. Nous vous demandons d’informer vos membres des différentes provinces et communautés afin qu’ils puissent être présents à ces dates et dans ces 2 heures particulières pour participer activement à l’événement.

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Au nom de la Commission de la Famille Combonienne pour la Ministérialité Sociale, je vous salue fraternellement et nous restons unis dans la prière en ce moment difficile mais aussi plein de nouvelles opportunités. Que Dieu nous accompagne et nous bénisse !

P. Daniele Moschetti, MCCJ
Coordinateur de la commission
Rome, le 16 octobre 2020

Message du Pape François. 4ème Journée Mondiale des Pauvres

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« Tends ta main au pauvre » (Si 7, 32)

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« Tends ta main au pauvre » (Si 7, 32). La sagesse antique a fait de ces mots comme un code sacré à suivre dans la vie. Ils résonnent encore aujourd’hui, avec tout leur poids de signification, pour nous aider, nous aussi, à concentrer notre regard sur l’essentiel et à surmonter les barrières de l’indifférence. La pauvreté prend toujours des visages différents qui demandent une attention à chaque condition particulière : dans chacune d’elles, nous pouvons rencontrer le Seigneur Jésus qui a révélé sa présence dans ses frères les plus faibles (cf. Mt 25, 40).

1. Prenons entre les mains le texte du Livre de Ben Sira, un des livres de l’Ancien Testament. Nous y trouvons les paroles d’un maître de sagesse qui a vécu environ deux cents ans avant le Christ. Il était en recherche de la sagesse, celle qui rend les hommes meilleurs et capables de scruter à fond les événements de la vie. Il le faisait à un moment de dure épreuve pour le peuple d’Israël, un temps de douleur, de deuil et de misère, à cause de la domination de puissances étrangères. Étant un homme de grande foi, enraciné dans les traditions des pères, sa première pensée était de s’adresser à Dieu pour lui demander le don de la sagesse. Et l’aide du Seigneur ne lui manqua pas.

Dès les premières pages, le Livre de Ben Sira donne des conseils sur de nombreuses situations concrètes de la vie, et la pauvreté en est une. Il insiste sur le fait que, dans le besoin, il faut avoir confiance en Dieu : «Ne t’agite pas à l’heure de l’adversité. Attache-toi au Seigneur, ne l’abandonne pas, afin d’être comblé dans tes derniers jours. Toutes les adversités, accepte-les ; dans les revers de ta pauvre vie, sois patient ; car l’or est vérifié par le feu, et les hommes agréables à Dieu par le creuset de l’humiliation. Dans les maladies comme dans le dénuement, aie foi en lui. Mets ta confiance en lui, et il te viendra en aide ; rends tes chemins droits, et mets en lui ton espérance. Vous qui craignez le Seigneur, comptez sur sa miséricorde, ne vous écartez pas du chemin, de peur de tomber. » (2, 2-7).

2. Page après page, nous découvrons un précieux recueil de suggestions sur la façon d’agir à la lumière d’une relation intime avec Dieu, créateur et amant de sa création, juste et providentiel envers tous ses enfants. La référence constante à Dieu, cependant, n’empêche pas de regarder l’homme concret, bien au contraire, les deux choses sont étroitement liées.

Ceci est clairement démontré par l’extrait biblique dont le titre de ce Message est tiré (cf. 7, 29-36). La prière à Dieu et la solidarité avec les pauvres et les souffrants sont inséparables. Pour célébrer un culte qui soit agréable au Seigneur, il est nécessaire de reconnaître que toute personne, même la plus indigente et la plus méprisée, porte l’image de Dieu imprimée en elle. De cette attention découle le don de la bénédiction divine, attirée par la générosité pratiquée à l’égard du pauvre. Par conséquent, le temps consacré à la prière ne peut jamais devenir un alibi pour négliger le prochain en difficulté. Le contraire est vrai : la bénédiction du Seigneur descend sur nous et la prière atteint son but quand elles sont accompagnées par le service aux pauvres.

3. Cet antique enseignement est combien actuel pour chacun de nous ! En effet, la parole de Dieu dépasse l’espace, le temps, les religions et les cultures. La générosité qui soutient le faible, console l’affligé, apaise les souffrances, restitue la dignité à ceux qui en sont privés, est en fait la condition d’une vie pleinement humaine. Le choix de consacrer une attention aux pauvres, à leurs nombreux et divers besoins, ne peut être conditionné seulement par le temps disponible ou par des intérêts privés, ni par des projets pastoraux ou sociaux désincarnés. On ne peut étouffer la force de la grâce de Dieu par la tendance narcissique de toujours se mettre à la première place.

Avoir le regard tourné vers le pauvre est difficile, mais plus que jamais nécessaire pour donner à notre vie personnelle et sociale la bonne direction. Il ne s’agit pas d’exprimer beaucoup de paroles, mais plutôt d’engager concrètement la vie, animée par la charité divine. Chaque année, avec la Journée Mondiale des Pauvres, je reviens sur cette réalité fondamentale pour la vie de l’Église, parce que les pauvres sont et seront toujours avec nous (cf. Jn 12, 8) pour nousaider à accueillir la présence du Christ dans l’espace du quotidien.

4. Chaque rencontre avec une personne en situation de pauvreté nous provoque et nous interroge. Comment pouvons-nous contribuer à éliminer ou, du moins, à soulager sa marginalisation et sa souffrance? Comment pouvons-nous l’aider dans sa pauvreté spirituelle ? La communauté chrétienne est appelée à s’impliquer dans cette expérience de partage, sachant qu’il ne lui est pas permis de la déléguer à qui que ce soit. Et pour être un soutien aux pauvres, il est fondamental de vivre personnellement la pauvreté évangélique. Nous ne pouvons pas nous sentir “bien” quand un membre de la famille humaine est relégué dans les coulisses et devient une ombre. Le cri silencieux des nombreux pauvres doit trouver le peuple de Dieu en première ligne, toujours et partout, afin de leur donner une voix, de les défendre et de se solidariser avec eux devant tant d’hypocrisie et devant tant de promesses non tenues, pour les inviter à participer à la vie de la communauté.

Il est vrai que l’Église n’a pas de solutions globales à proposer, mais elle offre, avec la grâce du Christ, son témoignage et ses gestes de partage. Elle se sent en outre le devoir de présenter les instances de ceux qui n’ont pas le nécessaire pour vivre. Rappeler à tous la grande valeur du bien commun est, pour le peuple chrétien, un engagement de vie qui se réalise dans la tentative de n’oublier aucun de ceux dont l’humanité est violée dans ses besoins fondamentaux.

5. Tendre la main fait découvrir, avant tout à celui qui le fait, qu’existe en nous la capacité d’accomplir des gestes qui donnent un sens à la vie. Que de mains tendues pouvons-nous voir tous les jours ! Malheureusement, il arrive de plus en plus souvent que la hâte entraîne dans un tourbillon d’indifférence, au point que l’on ne sait plus reconnaître tout le bien qui se fait quotidiennement, en silence et avec grande générosité. C’est souvent lorsque surviennent des événements qui bouleversent le cours de notre vie que nos yeux deviennent capables de voir la bonté des saints “de la porte d’à côté”, « de ceux qui vivent proches de nous et sont un reflet de la présencede Dieu » (Exhort. ap. Gaudete et Exultate, n. 7), mais dont personne ne parle. Les mauvaises nouvelles abondent sur les pages des journaux, sur les sites internet et sur les écrans de télévision, au point de laisser croire que le mal règne en maître. Pourtant il n’en est pas ainsi. Certes, la méchanceté et la violence, l’abus et la corruption ne manquent pas, mais la vie est tissée d’actes de respect et de générosité qui, non seulement compensent le mal, mais poussent à aller au-delà et à être remplis d’espérance.

6. Tendre la main est un signe : un signe qui rappelle immédiatement la proximité, la solidarité, l’amour. En ces mois où le monde entier a été submergé par un virus qui a apporté douleur et mort, détresse et égarement, combien de mains tendues nous avons pu voir ! La main tendue du médecin qui se soucie de chaque patient en essayant de trouver le bon remède. La main tendue de l’infirmière et de l’infirmier qui, bien au-delà de leurs horaires de travail, sont restés pour soigner les malades. La main tendue de ceux qui travaillent dans l’administration et procurent les moyens de sauver le plus de vies possibles. La main tendue du pharmacien exposé à tant de demandes dans un contact risqué avec les gens. La main tendue du prêtre qui bénit avec le déchirement au cœur. La main tendue du bénévole qui secourt ceux qui vivent dans la rue et qui, en plus de ne pas avoir un toit, n’ont rien à manger. La main tendue des hommes et des femmes qui travaillent pour offrir des services essentiels et la sécurité. Et combien d’autres mains tendues que nous pourrions décrire jusqu’à en composer une litanie des œuvres de bien. Toutes ces mains ont défié la contagion et la peur pour apporter soutien et consolation.

7. Cette pandémie est arrivée à l’improviste et nous a pris au dépourvu, laissant un grand sentiment de désorientation et d’impuissance. Cependant, la main tendue aux pauvres ne vient pas à l’improviste. Elle témoigne de la manière dont on se prépare à reconnaître le pauvre afin de le soutenir dans les temps de nécessité. On n’improvise pas les instruments de miséricorde. Un entraînement quotidien est nécessaire, à partir d’une prise de conscience que nous, les premiers, avons combien besoin d’une main tendue vers nous.

Ce moment que nous vivons a mis en crise beaucoup de certitudes. Nous nous sentons plus pauvres et plus faibles parce que nous avons fait l’expérience de la limite et de la restriction de la liberté. La perte du travail, des relations affectives les plus chères, comme l’absence des relations interpersonnelles habituelles, a tout d’un coup ouvert des horizons que nous n’étions plus habitués à observer. Nos richesses spirituelles et matérielles ont été remises en question et nous avons découvert que nous avions peur. Enfermés dans le silence de nos maisons, nous avons redécouvert l’importance de la simplicité et d’avoir le regard fixé sur l’essentiel. Nous avons mûri l’exigence d’une nouvelle fraternité, capable d’entraide et d’estime réciproque. C’est un temps favorable pour « reprendre conscience que nous avons besoin les uns des autres, que nous avons une responsabilité vis-à-vis des autres et du monde […]. Depuis trop longtemps, déjà, nous avons été dans la dégradation morale, en nous moquant de l’éthique, de la bonté, de la foi, de l’honnêteté. […] Cette destruction de tout fondement de la vie sociale finit par nous opposer les uns aux autres, chacun cherchant à préserver ses propres intérêts ; elle provoque l’émergence de nouvelles formes de violence et de cruauté, et empêche le développement d’une vraie culture de protection de l’environnement » (Lett. enc. Laudato Si’, n. 229). En somme, les graves crises économiques, financières et politiques ne cesseront pas tant que nous laisserons en état de veille la responsabilité que chacun doit sentir envers le prochain et chaque personne.

8. « Tends la main au pauvre », est donc une invitation à la responsabilité comme engagement direct de quiconque se sent participant du même sort. C’est une incitation à prendre en charge le poids des plus faibles, comme le rappelle saint Paul : « Mettez-vous, par amour au service les uns des autres. Car toute la Loi est accomplie dans l’unique parole que voici : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. (…) Portez les fardeaux des uns les autres » (Ga 5,13-14 ; 6,2). L’Apôtre enseigne que la liberté qui nous a été donnée par la mort et la résurrection de Jésus Christ est pour chacun de nous une responsabilité pour se mettre au service des autres, surtout des plus faibles. Il ne s’agit pas d’une exhortation facultative, mais d’une condition de l’authenticité de la foi que nous professons.

Le Livre de Ben Sira vient une fois de plus à notre aide : il suggère des actions concrètes pour soutenir les plus faibles et il utilise également quelques images suggestives. Tout d’abord, il prend en considération la faiblesse de ceux qui sont tristes : « Ne te détourne pas ceux qui pleurent » (7, 34). La période de la pandémie nous a obligés à un isolement forcé, nous empêchant même de pouvoir consoler et d’être près d’amis et de connaissances affligés par la perte de leurs proches. Et l’auteur sacré affirme encore : « N’hésite pas à visiter un malade » (7, 35). Nous avons fait l’expérience de l’impossibilité d’être aux côtés de ceux qui souffrent, et en même temps, nous avons pris conscience de la fragilité de notre existence. En somme, la Parole de Dieu ne nous laisse jamais tranquilles, elle continue à nous stimuler au bien.

9. « Tends la main au pauvre » fait ressortir, par contraste, l’attitude de ceux qui tiennent leurs mains dans leurs poches et ne se laissent pas émouvoir par la pauvreté, dont ils sont souvent complices. L’indifférence et le cynisme sont leur nourriture quotidienne. Quelle différence par rapport aux mains généreuses que nous avons décrites! Il y a, en effet, des mains tendues qui touchent rapidement le clavier d’un ordinateur pour déplacer des sommes d’argent d’une partie du monde à l’autre, décrétant la richesse des oligarchies et la misère de multitudes ou la faillite de nations entières. Il y a des mains tendues pour accumuler de l’argent par la vente d’armes que d’autres mains, même celles d’enfants, utiliseront pour semer la mort et la pauvreté. Il y a des mains tendues qui, dans l’ombre, échangent des doses de mort pour s’enrichir et vivre dans le luxe et le désordre éphémère. Il y a des mains tendues qui, en sous-main, échangent des faveurs illégales contre un gain facile et corrompu. Et il y a aussi des mains tendues de ceux qui, dans l’hypocrisie bienveillante, portent des lois qu’eux-mêmes n’observent pas.

Dans ce panorama, « les exclus continuent à attendre. Pour pouvoir soutenir un style de vie qui exclut les autres, ou pour pouvoir s’enthousiasmer avec cet idéal égoïste, on a développé une mondialisation de l’indifférence. Presque sans nous en apercevoir, nous devenons incapables d’éprouver de la compassion devant le cri de douleur des autres, nous ne pleurons plus devant le drame des autres, leur prêter attention ne nous intéresse pas, comme si tout nous était une responsabilité étrangère qui n’est pas de notre ressort.» (Exhort. ap. Evangelii Gaudium, n. 54). Nous ne pourrons pas être heureux tant que ces mains qui sèment la mort ne seront pas transformées en instruments de justice et de paix pour le monde entier.

10. « Quoi que tu fasses, souviens-toi que ta vie a une fin » (Si 7, 36). C’est l’expression par laquelle le Livre de Ben Sira conclut sa réflexion. Le texte se prête à une double interprétation. La première fait ressortir que nous devons toujours garder à l’esprit la fin de notre existence. Se souvenir du destin commun peut aider à mener une vie sous le signe de l’attention à ceux qui sont les plus pauvres et qui n’ont pas eu les mêmes possibilités que nous. Il y a aussi une deuxième interprétation, qui souligne plutôt le but vers lequel chacun tend. C’est la fin de notre vie qui demande un projet à réaliser et un chemin à accomplir sans se lasser. Or, le but de chacune de nos actions ne peut être autre que l’amour. Tel est le but vers lequel nous nous dirigeons, et rien ne doit nous en détourner. Cet amour est partage, dévouement et service, mais il commence par la découverte que nous sommes les premiers aimés et éveillés à l’amour. Cette fin apparaît au moment où l’enfant rencontre le sourire de sa mère et se sent aimé par le fait même d’exister. Même un sourire que nous partageons avec le pauvre est source d’amour et permet de vivre dans la joie. Que la main tendue, alors, puisse toujours s’enrichir du sourire de celui qui ne fait pas peser sa présence et l’aide qu’il offre, mais ne se réjouit que de vivre à la manière des disciples du Christ.

Que sur ce chemin quotidien de rencontre avec les pauvres nous accompagne la Mère de Dieu, qui plus que tout autre est la Mère des pauvres. La Vierge Marie connaît de près les difficultés et les souffrances de ceux qui sont marginalisés, parce qu’elle-même s’est trouvée à donner naissance au Fils de Dieu dans une étable. Sous la menace d’Hérode, avec Joseph son époux et l’Enfant Jésus, ils se sont enfuis dans un autre pays, et la condition de réfugié a marqué, pendant quelques années, la Sainte Famille. Puisse la prière à la Mère des pauvres rassembler ses enfants favoris et tous ceux qui les servent au nom du Christ. Que la prière transforme la main tendue en une étreinte de partage et de fraternité retrouvée.

Donné à Rome, Saint Jean du Latran, le 13 juin 2020, mémoire liturgique de saint Antoine de Padoue, huitième année de mon Pontificat.

François

Le vent du changement. Histoires de vie et de ministérialité sociale

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Les Comboniens et les Comboniennes sont nés grâce au Plan de San Daniele Comboni pour régénérer l’Afrique avec l’Afrique elle-même. Le Plan a été publié pour la première fois en 1864, mais il a été révisé et mis à jour sept fois par Comboni lui-même : c’était une inspiration d’en haut, le fruit de l’amour compatissant du Bon Pasteur pour l’Afrique que Comboni appelait “la perle noire” ; mais aussi une participation d’en bas, avec différentes expressions de la mission, des stratégies, l’implication de groupes ecclésiaux, de philanthropes, de scientifiques et de géographes, pour la recherche de personnel et de fonds pour sa réalisation.

Les biographes de Comboni reconnaissent certaines de ses caractéristiques fondamentales, notamment sa clairvoyance pratique et dynamique et sa foi inébranlable dans la régénération de l’Afrique, malgré les obstacles, les croix, les malentendus, les critiques et les calomnies ; Preuve en est que deux Africains, Daniele Sorur Pharim Den (1860-1900) et Fortunata Quascè (1845-1899), tous deux Soudanais et sortis de l’esclavage, dans la vision inclusive du travail combonien, ont immédiatement épousé le Plan et, par leur ministère, ont révélé son efficacité.

Le premier décrit la condition réelle des Noirs et souligne que la régénération des Africains ne peut se faire qu’à deux conditions : briser le joug de l’esclavage et offrir aux Africains les mêmes possibilités de formation que celles qui sont offertes à tous les autres peuples. La seconde a consacré toute sa vie à la formation et à la préparation des jeunes filles africaines, afin qu’à leur tour, libérées de tout esclavage, elles entament des processus de régénération au cœur de l’Afrique noire.

Depuis plus de 150 ans, les héritiers de Comboni, éclairés d’en haut, avec la même détermination et la même confiance ; animés par un amour compatissant pour les plus pauvres et les plus abandonnés, ont donné forme au rêve de régénérer l’Afrique à travers le ministère social, en adaptant le plan aux temps et aux lieux, dans le souffle de l’Esprit qui “renouvelle la face de la terre” (Ps 103,30). Un patrimoine important à connaître et à valoriser, surtout aujourd’hui, pour faire face à un système néolibéral de prédateurs, qui centralise la richesse dans les mains de quelques-uns et favorise la culture du déchet excluant des milliards de personnes des conditions de vie pleine.

C’est pourquoi pour 2020, année que les missionnaires comboniens ont consacrée à la ministérialité, les directions générales, consacrés, séculiers et laïcs de la famille combonienne ont demandé à une commission, nommée ad hoc, de publier un livre dans lequel sont racontées quelques histoires de vie vécues dans les ministères sociaux. En même temps, élargir la recherche à travers une cartographie de nos présences et de nos engagements, en impliquant les communautés de la famille combonienne, dispersées sur les quatre continents. L’objectif était de :

  • Élaborer des critères, des modalités et des principes communs dans les expériences de collaboration existantes, en les inscrivant dans une perspective institutionnelle.
  • Évaluer l’impact de transformation des différents ministères sur la réalité sociale et la façon dont notre présence ministérielle répond à un réel besoin de signes des temps.

Ce travail a sans aucun doute été ambitieux, mais en même temps limité, dans le sens où il est toujours difficile d’inclure la richesse de l’expérience vécue dans un document écrit. Aussi parce qu’il est embarrassant de faire des choix parmi les expériences de 3.500 missionnaires consacrés, séculiers, laïcs et laïques qui travaillent selon le charisme combonien, en Afrique, en Amérique, en Asie et en Europe.

Le livre intitulé “Nous sommes mission. Témoins de ministérialité sociale dans la famille combonienne“, a été publié en juin 2020, en quatre langues (italien, anglais, espagnol et français). Le travail a été le fruit de la collaboration de 61 missionnaires, invités à raconter leur expérience de ministérialité sociale ; deux experts externes ont également fait une lecture sapientielle de ce matériel, indiquant les points forts de l’engagement ministériel et les nœuds à défaire pour une plus grande efficacité pour le changement du système.

Les récits et les partages faits dans ce texte aident à comprendre que, même dans la multiplicité des situations, des approches et des initiatives, la dimension sociale est l’axe transversal de tout ministère ; en ce sens que tout service, compris comme un don de Dieu, par sa force intrinsèque même, proclame la libération des opprimés, “l’année de grâce(Lc 4,18-19) et révèle au peuple “les cieux nouveaux et la terre nouvelle(Ap 21,1) dans le plan originel et providentiel de Dieu.

Le récit de la pratique de la ministérialité sociale, pour cette raison, enrichit le paradigme de référence de la mission, toujours plus incarnée dans la complexité du monde actuel et attentive à la lecture des signes des temps et des lieux, afin de pouvoir ré-annoncer à tous les peuples la foi en Jésus-Christ, avec des langages et des styles de présence appropriés.

Le processus entamé sera long et progressif dans le temps, mais il pourra tirer profit de certains thèmes et suggestions mis en évidence par ces actions et d’autres qui seront exprimés dans la cartographie générale de la famille combonienne. Il y aura également un moment de collecte, d’approfondissement, de synthèse, de discernement et de relance lors du Forum sur les ministères sociaux comboniens à Rome, en décembre prochain 2020.

Nous ne partons pas de rien ni de théories, mais d’événements vécus et racontés dans la vie quotidienne de la mission combonienne, qui peuvent être résumés par quelques verbes :

Voir : avec “des yeux pénétrants et un cœur ouvert” pour relever les défis et les opportunités de l’annonce de l’Evangile.

Devenir proche : dans la dynamique d’une Eglise missionnaire et “en sortie“, qui vit en marge et touche les blessures de ses frères et sœurs, en prenant sur elle l’odeur des brebis et le mode de vie des pauvres.

La rencontre : vivre et promouvoir la mystique de la rencontre. Professer la catholicité et réduire la distance entre les croyances et les cultures, par le dialogue et l’œcuménisme, pour une fraternité mondiale.

Régénérer : se laisser interpeller par la réalité et rechercher avec assiduité les cinq pains et les deux poissons des petits, l’offrande de la veuve, l’eau de la purification des peuples.

Transformer : il n’y a plus de temps pour le changement, il est temps de changer ! Il est temps d’affronter les causes qui génèrent l’inégalité entre les personnes et entre les peuples et la culture du gaspillage.

Célébrer : Tout ce qui donne corps au ministère social et configure les disciples au mystère pascal du Christ, support de la foi dans la vie quotidienne de la mission.

Repartir : Dans le regard de l’Esprit, il n’y a plus de place pour l’autoglorification et la vaine gloire ; tout est ressenti dans la flamme du feu qui purifie et nous pousse à oser et à repartir sur de nouveaux chemins et routes, afin qu’ils soient de plus en plus les voies de Dieu.

Les domaines de la ministérialité sociale

Le cœur du ministère social est d’écouter le cri des pauvres, de faire alliance avec eux pour que leurs attentes soient satisfaites et les rendre capables de transformation ; dans la logique évangélique du Seigneur : « Celui qui de riche est devenu pauvre, pour nous enrichir par sa pauvreté » (2 Co 8, 9).

En tant que Famille Combonienne, nous avons toujours travaillé dans la dimension sociale : la formation des consciences et la préparation des leaders professionnels ; les médias et la communication ; le soin et l’attention aux personnes, la santé et l’éducation ; les périphéries existentielles et géographiques (comme le soin des enfants de la rue, les situations de guerre et de conflit, les minorités ethniques ; le trafic des enfants et des femmes ; les droits de l’homme ; les prisons, les pasteurs…) ; la mobilité humaine et la pastorale des migrants ; la sauvegarde de la création ; la liturgie et la catéchèse.

Perspectives

Le processus de mise en valeur de la dimension sociale des ministères ne peut et ne doit pas être considéré comme une action circonstancielle et limitée dans le temps. C’est un long chemin, selon la tradition vivante de l’Église. Il doit être soutenu, nourri et révisé dans le rythme accéléré des changements d’époque, afin de donner efficacité et créativité à la présence missionnaire et charismatique de la Famille Combonienne dans le monde d’aujourd’hui.

La dimension sociale dans le ministère nous invite donc à revoir l’idée de mission. Une invitation à la Famille Combonienne à réfléchir sur ce qu’elle veut être et ce qu’elle veut accomplir pour le bien de l’humanité en construisant le Royaume de Dieu. Le fil conducteur est toujours la mission, avec ces caractéristiques particulières :

  • la transformation du système qui génère la culture des déchets ;
  • la promotion de l’Evangile de l’attention aux personnes, par la proximité et la compassion comme celles du Samaritain ;
  • la synodalité, dans l’implication et la participation effective de tous les ministères ;
  • la conversion écologique, conscients qu’en sauvegardant la maison commune nous créerons des conditions de vie dignes pour tous, en particulier pour les exclus.

C’est pourquoi le titre du livre “Nous sommes mission”, devient un appel à la mission, vécue comme une communauté de personnes régénérées et communion combonienne entre sœurs, frères et laïcs, de plus en plus articulée et interconnectée avec d’autres groupes et associations ecclésiaux et laïcs, comme partie intégrante du Peuple de Dieu.

Ce processus de changement amplifie le rêve combonien de régénérer l’Afrique par l’Afrique dans la perspective du grand rêve du Pape François, exprimé dans l’Exhortation Apostolique post-synodale “Querida Amazonia” : le rêve de construire une nouvelle société avec l’inclusion des “rejetés” et un nouveau pacte social pour le bien commun. Le rêve culturel d’une humanité plurielle ; le rêve écologique où tout est lié et l’engagement à sauver la terre garantit l’avenir de toute l’humanité. Enfin, le rêve ecclésial, bien symbolisé par l’image d’un “hôpital de campagne”, immergé dans la vie et la réalité des pauvres et des marginaux, qui touche les blessures des frères et sœurs et verse l’huile de la paix et de la réconciliation.
Fernando Zolli e Daniele Moschetti

Le rôle ministériel du frère

Joel Cruz
Joel Cruz

L’INCARNATION DE LA PAROLE, LA FRATERNITÉ ET LA PROMOTION HUMAINE

Nous présentons ci-dessous l’expérience du frère Joel Cruz Reyes en Équateur. On pourra dégager quelques caractéristiques du ministère du Frère dans une nouvelle perspective de promotion humaine qui a pour fondement La Parole.

1. Rencontre avec la mission

En 1997, je suis arrivé en Équateur, affecté au Centre culturel afro-équatorien de la ville de Guayaquil. À cette époque, l’accompagnement des personnes d’origine africaine s’articulait autour de la religiosité, de la formation liturgique et sacramentaire et socio-politique, dans le but de les rendre visibles sur le plan social et ecclésial. Pour cela, le soutien d’experts laïcs en psychologie, anthropologie, sociologie, politique a été recherché.

D’après le comportement, les attitudes et les motivations que j’ai perçus chez les Afros qui venaient au Centre, je me suis rendu compte que leur dépendance vis-à-vis du missionnaire était chronique. Ils avaient pris l’habitude de se considérer comme matériellement, spirituellement et moralement démunis. Certes, ce comportement était le reflet des ombres de leur histoire qui les atteignaient dans le présent, mais il était aussi la conséquence de la vision paternaliste qui avait prévalu dans leur accompagnement. Cela ne leur a pas permis de grandir en humanité et en esprit ; cela les a fait stagner à la place de « l’objet », cela ne leur a pas permis d’avancer vers la place de « sujet » ecclésial et social.

2. Comprendre et lancer des processus

Peu à peu, j’ai compris que ces processus, bien que très bons, étaient déconnectés de la foi et de la Parole, comme si la « régénération de l’être humain afro » n’était qu’un problème « humain-social ». J’ai réalisé que les processus n’atteignaient pas la contemplation de l’afro-descendant comme enfant de Dieu, image et ressemblance de Lui, sculpté par l’histoire, les circonstances sociales et ecclésiales adverses, certes, mais en fin de compte l’être humain pensé, voulu par Dieu et avec une mission spécifique dans l’Église, dans la société, dans le monde.

Les résultats étaient logiques car, d’une part, l’accompagnement pyramidal hérité de la tradition pastorale prédominante dans l’Église les rendait « dépendants » de l’action du « sujet » qu’était le missionnaire. D’autre part, l’intervention de spécialistes laïcs sans vision religieuse, de foi et déconnectés de la Parole de Dieu, ne pouvait offrir qu’une façon de voir le descendant africain et son histoire, comme un « problème » personnel et social. Ils ne se considéraient pas comme des « êtres humains » mais comme un « problème social » et un « objet » d’abus, de maltraitance et d’exclusion. Ils étaient convaincus qu’ils n’étaient que des « victimes » et non des êtres humains ayant une responsabilité ecclésiale et sociale.

3. Une présence qui partage la vie

Quand j’ai commencé à cheminer avec eux, je me suis rendu compte que la présence du Frère qui, par sa nature vocationnelle, est dépouillé du sacré, « arrondit » peu à peu la pyramide relationnelle dans les structures culturelles, sociales et ecclésiales, jusqu’à consolider la circularité de la fraternité ministérielle voulue par Jésus. Que le Frère, précisément parce qu’il est religieux, est capable de contempler l’humanité des personnes qu’il accompagne et de mettre cette humanité en mouvement (promotion humaine) dans l’Église et dans la société.

J’ai compris que le Frère est un pont entre la science et la foi, entre l’Évangile et la société, entre l’Église et le monde, entre la vie religieuse et la vie séculière, entre le ministère sacerdotal et le ministère laïc. Sans sa présence, les processus deviennent souvent « extrêmes » : ils vont à « l’extrême liturgique et sacramentel » ou à « l’extrême politico-social”. Et le Frère a un pied à chaque extrémité. Il est donc capable d’équilibrer les processus d’évangélisation et de faire en sorte que l’être humain considère son histoire non pas comme une tragédie humaine sans Dieu, mais comme une histoire sacrée de salut, où Dieu n’est pas seulement présent mais s’est fait chair et assume les causes de cet être humain comme siennes.

4. Les miracles de la fraternité

Le Seigneur m’a donné l’occasion de voir les miracles de la fraternité qui naissent de la conscience de savoir que nous sommes tous frères et sœurs, enfants d’un même Père. Avec la même dignité et la même responsabilité missionnaire que le Christ et, par conséquent, compris comme le Corps noir du Christ dans cette société discriminatoire et exclusive qui a également éclipsé l’Église dans ce contexte. Cela m’a donné l’occasion de faire l’expérience de la force libératrice de ce « devenir un de plus parmi eux », de ne pas avoir peur de « s’abaisser », comme Jésus (Ph 2, Emmaüs) et de chercher avec eux les voies, les réponses, les solutions.

Le fait d’être parmi les personnes d’origine africaine comme « compagnon de voyage » et non comme guide ou maître, a fait que les gens ont commencé à goûter et à savourer la communion et la participation, à comprendre la valeur et la puissance du « cénacle d’apôtres » rêvé par Saint Daniel Comboni. Ainsi est née la Fraternité des Missionnaires Afro-équatoriens, la Voie Afro-Biblique, les processus d’ethno-éducation et de récréation culturelle en milieu urbain, les organisations et associations afro à but culturel et socio-politique, la pastorale de la jeunesse afro …

Le chemin fraternel avec les Afros m’a permis de contempler comment “l’objet” s’est transformé en un “sujet” social et ecclésial. Et tout a commencé quand ils se sont découverts comme des êtres humains, des enfants de Dieu, des missionnaires du Père. Et cette conscience est semée en vivant avec eux, en discutant avec eux, comme Jésus l’a fait avec ses disciples : sur la route, dans la maison, à la fête, dans leurs lieux … en conversant, en répondant aux préoccupations, en expliquant, en partageant sans hâte, sans lieux fixes … souvent loin du temple.

Ayant fait l’expérience du pouvoir régénérateur de la fraternité chez les êtres humains, j’ai pensé et imaginé le Frère Missionnaire Combonien comme une “sage-femme” de ministères laïcs qui dépassent les structures de l’église et les questions religieuses. D’un ministère qui touche aux questions humaines et sociales ; comme compagnon de ces ministères qui naissent avec une projection séculière afin de leur insuffler l’Esprit et d’être la force transformatrice de Dieu dans la société.

Le chemin avec les gens m’a guidé à me reconnaître comme un Frère religieux, c’est-à-dire un “expert” dans l’établissement du lien profond entre le monde et Dieu, entre la chair et l’esprit, entre l’humain et le divin. Un expert qui aide l’être humain à comprendre Dieu comme un citoyen qui agit dans la société dans laquelle il se trouve à travers cet être humain qui se reconnaît comme sa présence.

5. S’interroger et regarder vers l’avenir

Mais comment faire en sorte que la fraternité qui promeut l’humanité du peuple soit renforcée et ne finisse pas par se diluer dans la tradition évangélisatrice qui se tourne davantage vers le liturgique et le sacramental ? Comment rendre le ministère de l’incarnation du Verbe dans les ministères qui touchent aux questions humaines et sociales plus visible et plus significatif dans l’Institut, l’Église et la société ? Ces questions ont trouvé une réponse dans la proposition faite par Saint Daniel Comboni de créer des Centres de Formation où l’Africain ne change pas et le missionnaire ne meurt pas.

Cette stratégie me semblait la plus adéquate pour la réalité numérique et dispersée du Frère dans l’Institut et, ainsi, pouvoir penser à une figure physique qui accompagne le ministère du Frère, l’identifie, le définit et le rend plus compréhensible. C’est pourquoi, tout comme le prêtre est accompagné de la figure de la paroisse, un travail qui explique et rend son ministère compréhensible, j’ai commencé à imaginer un travail qui pourrait faire exploser toute la force ministérielle de la fraternité dans l’Institut. Ainsi est née l’idée des OCPH (Œuvres Comboniennes pour la Promotion Humaine) et le Centre Culturel Afro-équatorien de Guayaquil est devenu la première de ces œuvres.

POUR UNE RÉFLEXION PERSONNELLE ET COMMUNAUTAIRE :

  1. Qu’est-ce qui me frappe le plus dans cette expérience religieuse ? pourquoi ?
  2. Qu’est-ce que cette expérience suscite en moi ? Pour quelle raison ?
  3. Que nous dit-elle en tant que communauté ?
  4. Quelle partie ou quelles parties de cette expérience peuvent éclairer le travail paroissial ou les projets missionnaires dans nos communautés/missions ?

POUR ALLER PLUS EN PROFONDEUR

Orientations du Pape François et de Benoît XVI sur la fraternité

Réflexions tirées du document « Notes pour une spiritualité missionnaire de la Fraternité » du Fr. Alberto Degan

En ce troisième millénaire, le Pape propose une mission fascinante : combattre la « globalisation de l’indifférence » en construisant la « globalisation de la fraternité ». Naturellement, c’est un appel pour tous les chrétiens, mais en nous, Frères, cet appel suscite sans aucun doute un sentiment de joie et une responsabilité particulière.

  • Les deux premiers messages du pape François pour la Journée mondiale de la paix (les messages de 2014 et 2015) sont entièrement consacrés au thème de la fraternité. « La fraternité est le fondement et le chemin de la paix », nous dit François. En fait, la paix et la justice ne sont pas seulement une question “technique” de changements structurels pour réduire les inégalités scandaleuses qui caractérisent le monde aujourd’hui, ni une simple question politique. La paix et la justice sont avant tout un défi spirituel : ce n’est que si nous nous sentons frères, enfants d’un même Père, que les gens seront prêts à faire les changements et les “sacrifices” nécessaires pour donner vie à une société juste et fraternelle. Comme le dit François dans le message Urbi et orbi pour Noël 2018, « sans la fraternité que Jésus-Christ nous a donnée, nos efforts pour un monde plus juste n’iraient pas très loin » (Psaume 84, 11-12).
  • Le pape Benoît a proposé la fraternité comme principe économique : « Le développement économique, social et politique doit, pour être authentiquement humain, faire place au principe de la gratuité comme expression de la fraternité », dit-il dans son encyclique “Caritas in veritate” n. 34. Et il ajoute : « Le grand défi que nous avons … est de montrer … que dans les relations commerciales le principe de la gratuité et la logique du don, en tant qu’expressions de la fraternité, peuvent et doivent avoir leur place dans l’activité économique ordinaire » (CV 36). Benoît XVI propose que la logique de la fraternité reconfigure notre système économique.
  • Plus récemment, le pape François a consacré l’ensemble du message pour la Journée mondiale de la paix 2014 au thème de la fraternité : « La fraternité, fondement et chemin de la paix ». Les titres des différentes parties de ce document sont : « Vous êtes tous frères, (Mt 23,8) », « La fraternité, prémisse pour vaincre la pauvreté », « La redécouverte de la fraternité dans l’économie », « La fraternité éteint la guerre », « La fraternité génère la paix sociale », « La fraternité aide à protéger et à cultiver la nature ». C’est seulement en regardant rapidement ces titres que l’on comprend que pour François, la fraternité – loin d’être un concept aléatoire et “romantique” – est un principe de foi très concret avec des implications sociales, politiques et économiques incontournables. Selon le Pape, la justice sociale ne peut être construite si nous ne cultivons pas d’abord un profond sentiment de fraternité dans nos cœurs.
  • La première partie de ce document est intitulée « Où est votre frère ? » (Gen 4:9). Dans la Bible, c’est la deuxième question que Dieu adresse à l’homme, et cela signifie que pour Dieu, c’est une question fondamentale. Les êtres humains, tels qu’ils ont été conçus par notre Créateur, réalisent leur humanité lorsqu’ils quittent leur égoïsme et se préoccupent des conditions de vie de leurs frères et sœurs, lorsqu’ils entrent dans une logique de communion et de fraternité qui leur fait percevoir que leur vie n’a de sens que si elle est vécue dans une attitude de solidarité avec leurs semblables. En d’autres termes, pour Dieu, être humain signifie être et se sentir frères.
  • Jésus se présente à nous comme le « premier-né parmi plusieurs frères » (Rom 8,29) : la fraternité est le chemin tracé par Dieu pour la réalisation de notre humanité. Comme le dit un proverbe africain, « Je suis un être humain parce que tu es un être humain », c’est-à-dire : »Je me sens bien et je peux réaliser mon humanité quand je vois que mes frères vont bien aussi et peuvent le réaliser ». Mais dans notre société, c’est la logique inverse qui prévaut, celle du vieil adage latin « Mors tua vita mea », qui signifie : « Ta mort est ma vie », « Ce n’est que si je te tue et que je prends possession de tes biens que je peux vivre heureux ».

Il n’est donc pas surprenant qu’Helmut Maucher – président de la multinationale Nestlé dans les années 80 et 90 – ait déclaré qu’il avait besoin de cadres ayant un « instinct de tueur ». Ainsi, comme l’affirme l’économiste Hinkelammert, « la lutte pour tuer l’autre est considérée comme une source de prospérité et de vie ». Ainsi, l’évangélisateur propose le modèle et la spiritualité de l’homme-frère contre le modèle et la “spiritualité” du tueur d’hommes.

Pour combattre l’injustice et la pauvreté, il faut donc une “révolution spirituelle”, une spiritualité de la fraternité qui nous fasse comprendre que la défaite et la mort de mon frère seront aussi, tôt ou tard, ma défaite et ma mort. Comme l’a dit Martin Luther King, « soit nous réussirons à vivre comme des frères, soit nous mourrons tous comme des imbéciles ».

  • Dans la Evangelii Gaudium (n.186), François affirme que notre amour pour « les plus abandonnés de la société » découle « de notre foi dans le Christ qui est toujours proche des pauvres ». Sans doute, face à tant de défis énormes, nous nous sentons souvent petits et impuissants : nous n’avons pas de réponses immédiates sur CE QU’IL FAUT FAIRE. Mais Jésus nous donne une indication très claire de l’endroit OÙ NOUS DEVONS ETRE : aujourd’hui comme hier, Jésus “toujours proche des pauvres” nous appelle à être PROCHE DES PAUVRES, PROCHE DES DERNIERS.

Notre Chapitre Général de 2015 a accepté cette invitation du Pape, et a donc indiqué comme premier critère de requalification de nos engagements le critère de « proximité avec les pauvres » (AC15 n.44.5). C’est un critère qui pour nous, Frères Comboniens, a une valeur particulière, parce que notre Fondateur nous a vus comme les plus proches des gens, parce que nous passons plus de temps avec eux : « En Afrique Centrale, les Frères artisans bien préparés contribuent davantage à notre apostolat que les prêtres à la conversion, parce que les élèves noirs et les néophytes (dont la majorité restent pour un temps assez long avec leurs ‘maîtres’ et ‘experts’, qui par leur parole et leur exemple sont de véritables apôtres pour leurs élèves) sont avec les frères, et ils les observent et les écoutent plus qu’ils ne peuvent observer et écouter les prêtres » ( E 5831).

Note : Voir aussi la dernière encyclique du pape François “Fratelli Tutti” sur la fraternité et l’amitié sociale (3 octobre 2020).

PRIÈRE PERSONNELLE

« Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire (cette gloire que comme Fils unique il tient du Père), pleine de grâce et de vérité. » Jn 1,14

Réflexions issues des rencontres continentales des Frères en Amérique :

  • Au milieu d’une mentalité et d’une tradition ecclésiale qui emprisonne la Parole de Dieu dans les temples, dans les discours théoriques et qui n’ose guère dépasser les structures ecclésiales et toucher aux questions humaines et sociales, s’insère la figure ministérielle du Frère Missionnaire Combonien.
  • Sa vocation à “faire devenir chair la Parole”, dans le contexte où il vit et vit ensemble, et à façonner l’être humain comme enfant de Dieu et frère de tous, l’amène à ouvrir des voies et des initiatives qui ne se limitent pas aux structures et aux traditions de l’Église, parce que “l’incarnation missionnaire du Verbe” est vécue en harmonie avec les temps et les lieux où il se trouve.
  • L’esprit fraternel de Dieu le conduit à l’insertion dans la vie et le quotidien des personnes, c’est pourquoi il est capable de découvrir et de sauver la richesse et l’expérience des individus et des groupes humains qu’il accompagne dans sa mission, dans le but d’enrichir l’Église, la société et de promouvoir l’aspect vraiment humain des peuples à travers lesquelles il passe, comme une œuvre et une révélation de Dieu qui doit être connue, reconnue, valorisée, assumée et proposée par l’Église au monde.
  • La cohabitation fraternelle avec les gens, à partir de la conscience et de l’esprit missionnaire, en fait le “radar” qui capte les signes, les signaux, les bruits, les défis… que la réalité humaine et sociale pose dans l’ici et le maintenant. Pour cette raison, sa parole et sa contribution sont décisives dans le dynamisme, la créativité et l’actualisation de la mission combonienne.
  • Son visage évangélique-social et fraternel fait de lui un “pont” entre la société et l’Eglise, entre le séculier et le religieux, entre les laïcs et le clergé. C’est précisément pour cette raison qu’il devient le visage social de l’engagement missionnaire de l’Église. Cette dimension vocationnelle l’insère au cœur de la sensibilité humaine qui recherche la solidarité, la justice, la paix et un engagement à transformer la société. Sa vocation en fait une présence qui renforce la conscience et l’esprit de l’être humain pour vivre le Royaume comme justice, paix, joie (Rm 14, 17 ss)
  • Le rôle du Frère comme personne consacrée et comme ministre du Christ est donc l’édification et la croissance humaine et chrétienne des personnes et des communautés, dans la perspective de l’Évangile ; pour cette raison, son action n’exclut pas le ministère de la Parole. Sa présence évangélisatrice au sein du peuple met l’accent sur la dimension de la fraternité sous tous ses aspects : le développement intégral des personnes, la promotion de la justice, de la paix, des droits de l’homme … c’est-à-dire que son ministère touche directement aux questions sociales, anthropologiques et culturelles dans la perspective du Royaume de Dieu.

LE PARTAGE DANS LA COMMUNAUTÉ ET LES LIGNES D’ACTION

  1. Dans une ambiance de prière et d’écoute mutuelle, partageons en communauté les fruits de notre prière personnelle.
  2. Réfléchissons ensemble :
  3. Que penses-tu de ce que nous avons partagé et prié maintenant sur le ministère du Frère ?
  4. A quoi nous invite l’Esprit, comme personne, comme communauté, comme province et en tant qu’Institut ?
  5. Comment répondre concrètement aux invitations de l’Esprit ?
  6. Notre engagement est : ___________________________________

“Le ministère des Frères, disciples du Christ fraternel, est attentif à la dimension de la fraternité sous tous ses aspects, y compris le développement intégral du peuple, la promotion de la justice, de la paix et des Droits Humains. Pour cette raison, il s’agit d’un ministère qui se consacre principalement à la dimension sociale, anthropologique et culturelle du Règne de Dieu, orienté vers la transformation sociale, le témoignage et l’annonce de la fraternité et l’animation de la communauté chrétienne”.

SUGGESTIONS POUR LA CELEBRATION DE L’EUCHARISTIE :

Au moment du NOTRE PÈRE, garder un moment de silence prolongé pour penser à la fraternité qui naît de Dieu

Campagne sur les effets néfastes de l’activité minière sur la santé et l’environnement

Piquia
Piquia

Aujourd’hui, 29 octobre, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), en collaboration avec Justiça nos Trilhos (Justice sur les rails), a lancé une campagne pour alerter les citoyens du monde qui consomment inconsciemment les produits des entreprises minières et sidérurgiques qui, depuis plus de trois décennies, détériorent la santé et polluent l’environnement de la communauté de Piquiá de Baixo, en Amazonie brésilienne.

La campagne marque le 30e anniversaire du Grupo Ferroeste dans la municipalité d’Açailândia et invite tout le monde à soutenir la lutte pour les droits de cette communauté, à laquelle les entreprises et l’État ont fermé les yeux pendant si longtemps.

Pour en savoir plus : https://bit.ly/3kFKur8